Emerick Darbelet: j'ai vécu une aventure humaine rare

AC Ajaccio

Il n’a évolué qu’une saison à l’ACA et pourtant ! Emerick Darbelet a marqué les mémoires à Ajaccio. Auteur de 8 buts lors la saison du titre de champion de D2 2001-2002, l’attaquant a fait l’unanimité grâce à ses qualités sportives et humaines. Avant de célébrer les 20 ans du titre, nous avons pris des nouvelles d’Emerick Darbelet. Entretien.

Le coup de fil de Rolland Courbis

Emerick, comment êtes-vous arrivé à l’ACA à l’été 2001?
C’est anecdotique, ma signature à l’ACA n’était pas du tout prévue. Je venais de faire une saison exceptionnelle à Amiens, on remontait en Ligue 2 et on sortait d’une finale de Coupe de France. J’étais persuadé de signer à nouveau à Amiens, d’ailleurs j’étais tombé d’accord avec Denis Troch. Mais il se trouve que le président de l’époque a voulu gérer quelques contrats et quelques semaines plus tard je n’avais toujours pas de proposition. Mon agent m’a appelé en me disant que Rolland Courbis devait m’appeler ! Il m’a appelé à 23h45, je m’en rappellerai toute ma vie ! Il m’a présenté son projet et dès le lendemain je lui ai dit que je m’engageais à l’ACA.

Comment se passe la discussion avec Rolland Courbis?
À cette époque, le fait que Rolland Courbis m’appelle en personne et qu’il connaisse aussi bien mon profil m’a permis de me sentir valorisé. Et j’ai dit oui rapidement. Amiens m’a fait une contre-proposition mais j’ai balayé cela rapidement malgré un contrat financier plus élevé. Je m’étais engagé oralement et c’est une des meilleures décisions de ma vie. 

Les valeurs insulaires partagées

L’ACA était un jeune club professionnel à votre arrivée, quel souvenir en avez-vous?
Il y avait au départ très peu de structures. Je me reconnais dans les paroles de Cyril Granon qui a évoqué avec vous les entrainements à Cauro ou à Baléone. C’était incroyable de vivre ça dans le monde professionnel. Aujourd’hui, je parle souvent de cette expérience-là. On prenait le café avant les entraînements avec les coéquipiers et des bières après, tous ensemble. C’est en fait cet état d’esprit qui nous a permis de créer quelque chose sans prendre en considération nos infrastructures.

En arrivant à Ajaccio, que pensez-vous du groupe concocté à l’intersaison?
Les joueurs qui ont été recrutés cette saison-là se sont intégrés aux joueurs historiques comme Anthony Garcia, Cyril Granon, Eric Colling... Ils nous ont fait comprendre ce que représentait les valeurs insulaires, le club dans la ville, ils avaient une âme et ont participé à l’histoire du club… Ils ont partagé tout ce qu’ils avaient avec nous. L’équipe était de très grande qualité sur le plan humain et sportif.

Un des meilleurs effectifs que j'ai côtoyé

Est-ce qu’un joueur vous a marqué en particulier?
Impossible d’en détacher un. Stéphane Trévisan arrivait de l’OM, à droite tu finis avec Walid Regragui. Tu te retrouves avec Martial Robin et Toto Squilacci. Je peux tous les cités, Eric Colling était un grand défenseur, David Terrier a réalisé une belle carrière, Samba N’Diaye qui était courtisé, « Sissou Granon » notre capitaine ! Le petit Xavier Bécas qui réalise une grande saison. C’était une équipe de malade, un des meilleurs effectifs avec lequel j’ai joué.

L’ambition du club ne vous a-t-elle pas fait peur au tout début?
« È parchi micca noi », c’était le slogan choisi par Michel Moretti et le club pour la saison 2001-2002. Au soir du premier match de championnat, on gagne et on est leader au classement. Je fini le match, j’appelle mon père et je lui dis « On sera au moins une fois premier ». Personnellement tu espères, tu es ambitieux, tu vois ce groupe de qualité mais de là à imaginer un titre alors qu’il y avait des grandes équipes ! L’appétit est venu en mangeant et on a réalisé quelque chose d’exceptionnelle.

Une aventure humaine rare

Quel souvenir gardez-vous du président Michel Moretti?
Il était affectif. Il avait toujours un mot gentil pour chaque joueur. J’en parle de temps en temps avec Gregory Ursule. On a eu beaucoup d’affection pour cet homme. Il m’a permis de vivre quelque chose d’exceptionnel. Il râlait peu, il était calme et quand il avait quelque chose à dire il était écouté. J’ai que du bon à dire sur lui, sur le club et tous les gens que j’ai connu à Ajaccio. C’était une aventure humaine rare.

Vous avez marqué les mémoires à Ajaccio cette année-là, pourquoi êtes-vous parti à la fin de la saison?
La saison a été riche ! Michel Moretti et Rolland Courbis ont été francs avec moi et ne m’ont pas garantie de temps de jeu en Ligue 1. J’avais donc un bon de sortie. Michel Moretti m’a laissé continuer à vivre ma passion en me libérant de mon indemnité. J’ai eu du mal à partir mais j’ai privilégié le jeu. J’ai ensuite évolué à Niort, Clermont et j’ai fini à l’AS Moulins dans mon club à 36 ans sur une montée en National.

Rodez, un club qui grandi

Comment en êtes-vous arrivé à devenir entraineur-adjoint?
Pendant ma carrière de joueur, j’ai toujours passé des diplômes. Le coach de l’AS Moulins m’a demandé à l’issue de ma saison si je voulais être son adjoint. Je me suis demandé si j’étais prêt à replonger là-dedans car c’est un métier totalement différent. J’ai réalisé dix années de football amateur à entrainer deux équipes par jour avant de rejoindre Rodez.

Racontez-nous vos premiers pas à Rodez
Durant le confinement, le coach Laurent Peyrelade m’a appelé et je me suis retrouvé en l’espace de 10 jours, près de ce groupe professionnel. Rodez est un club jeune, qui grandi, qui avance. C’est un plaisir de se lever tous les matins, j’ai de la chance d’être dans un club professionnel pour exercer mon métier, j’ai soif d’apprendre, soif de travail. Je mets beaucoup de cœur à l’ouvrage pour pouvoir continuer et que cela marche. Je n’ai pas eu que des moments faciles dans le football amateur. Les coups de téléphone de Laurent Peyrelade et Gregory Ursule sont arrivés à des moments difficiles de ma vie. Ils connaissaient le joueur que j’étais et l’homme mais pas l’entraîneur. Ils savaient que j’étais travailleur et que je pouvais m’acclimater facilement. C’était à moi de faire mes preuves, et d’en faire plus chaque jour pour montrer que je suis capable de faire des choses. C’est à l’image aussi de Gregory qui travaille beaucoup, nous sommes « multitâches ». Dans l’Aveyron, nous sommes dans une région de travailleurs, où les valeurs sont importantes.

Reconnaissant de la façon dont j'ai été accueilli

Vous connaissez très bien notre préparateur physique Tom Frère?
Oui, avec Tom Frère, nous nous sommes connus à Jura Sud, il fallait faire beaucoup de choses, apprendre, partager, j’ai beaucoup appris là-bas et avec Tom. J’essaye d’apporter tout ce que j’ai pu accumuler dans ma carrière en tant que joueur ou entraîneur. Tout cela me sert pour mettre des choses en place.

Avant de conclure cet entretien Emerick, quel souvenir gardez-vous d’Ajaccio?
J’ai passé qu’une année à Ajaccio mais je dis souvent, c’était juste ce qu’il faut pour tomber amoureux et juste ce qu’il faut pour ne pas être emprisonné et ne plus réussir à partir. Je suis toujours en contact avec les supporters du groupe I Guerrieri et ceux de l’Orsi Ribelli le groupe de que je côtoie quand je viens à Ajaccio. Tout le monde est toujours reconnaissant de ce que l’on a fait. Et moi je reste reconnaissant de la manière dont j’ai été accueilli, du partage et du contact des Corses. Je suis à chaque fois heureux de revenir à Ajaccio et de retrouver toutes ces personnes.


Photos: Michel Luccioni

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